Christine Delphy – Le genre précède le sexe (vf / 39min / 2015)

Un entretien intéressant avec Christine Delphy sur son analyse matérialiste du genre et de son rapport avec la notion de « sexe ».

Pour beaucoup de féministes, le sexe, c’est « biologique », et le genre « social ». Cette distinction a d’immenses vertus. Elle permet de mettre l’accent sur les causes sociales de la situation subordonnée des femmes dans la société – situation produite, organisée et donc pas inéluctable. Un des apports majeurs de la théorie de Christine Delphy est de complexifier l’analyse : il y a aussi, dit-elle, du social dans le biologique dans le sens où la catégorisation d’« homme » ou de « femme » (dont on pourrait penser qu’elle est tout bonnement « naturelle ») est une construction sociale, qui accompagne et même fonde la hiérarchie.

Cet entretien est un bonus tiré du DVD « Je ne suis pas féministe mais… » de Sylvie Tissot et Florence Tissot.

George Orwell – Dans la dèche à Paris et à Londres

Dans la dèche à Paris et à Londres (titre original : Down and out in Paris and London) est un livre autobiographique de George Orwell paru en 1933. L’auteur, à travers sa vie de travailleur pauvre et de vagabond, y décrit la misère à Paris et à Londres à la fin des années 1920 et au début des années 1930. Un témoignage terrible sur la condition des prolétaires européens du début du XXe siècle.

A la fin des années 20, Orwell tombe brusquement dans la misère. À Paris puis à Londres, il découvre le quotidien des petits ouvriers et des laissés-pour-compte, tenaillés par la faim et rongés par l’alcool. Sans voyeurisme ni complaisance, il dresse un portrait vivant de ces habitués du mont-de-piété où l’espoir et l’infortune se livrent un duel épique.

Cliquer sur la couverture pour télécharger le livre au format epub :

Si vous parlez à un riche n’ayant pas abdiqué toute probité intellectuelle de l’amélioration du sort de la classe ouvrière, vous obtiendrez le plus souvent une réponse du type suivant: « Nous savons bien qu’il n’est pas agréable d’être pauvre ; en fait, il s’agit d’un état si éloigné du nôtre qu’il nous arrive d’éprouver une sorte de délicieux pincement au cœur à l’idée de tout ce que la pauvreté peut avoir de pénible. Mais ne comptez pas sur nous pour faire quoi que ce soit à cet égard. Nous vous plaignons – vous, les classes inférieures – exactement comme nous plaignons un chat victime de la gale, mais nous lutterons de toutes nos forces contre toute amélioration de votre condition. Il nous paraît que vous êtes très bien où vous êtes. L’état des choses présent nous convient et nous n’avons nullement l’intention de vous accorder la liberté, cette liberté ne se traduirait-elle que par une heure de loisir de plus par jour. Ainsi donc, chers frères, puisqu’il faut que vous suiez pour payer nos voyages en Italie, suez bien et fichez nous la paix. »


On pourra également lire Le peuple de l’abîme que Jack London écrivit trente ans plus tôt pour mesurer la persistance de la misère du prolétariat de l’époque.

Plogoff, des pierres contre des fusils (vf / 92min / 1980)

Un documentaire réalisé pendant la lutte par Nicole Le Garrec.

Plogoff, février 1980. Toute une population refuse l’installation d’une centrale nucléaire à deux pas de la Pointe du Raz, en Bretagne. Six semaines de luttes quotidiennes menées par les femmes, les enfants, les pêcheurs, les paysans de cette terre finistérienne, désireux de conserver leur âme. Six semaines de drames et de joies, de violences et de tendresse: le témoignage d’une lutte devenue historique.

La bande annonce :

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Pour une théorie matérialiste du racisme

Une émission de théorisation matérialiste du racisme réalisée par Sortir du capitalisme, au-delà de l’antiracisme essentialiste, antisémite et social-démocrate du PIR et de l’antiracisme idéaliste, moral et parfois anti-musulmans des anti-racialisateurs, des républicains de gauche et des libéraux – avec Zaschia, auteur de plusieurs articles à ce sujet.

Écouter la première partie de l’émission :

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Avec une définition du racisme comme division inégalitaire, matérielle (division du travail capitaliste, statut légal, rapports de force géopolitiques, discriminations, violences policières) et idéologique (relativement autonome des rapports de domination racistes), de l’humanité en des « races » comme construction sociales réellement agissantes ; avec une explication matérialiste de l’origine des « races » non comme réalités biologiques mais comme aboutissement de processus situés de « racisation » politiques, économiques et idéologiques ; avec une comparaison des rapports de classe avec ceux de « race » (contestés dans leur réalité du fait d’un anti-racisme idéaliste, plus complexes du fait d’une multitude de racismes et de processus de racisation), ces derniers étant davantage essentialisants (et excluants, notamment en temps de crise), producteurs de discriminations spécifiques, et pouvant surclasser des hiérarchies de classe (un prolétaire non-racisé étant supérieur dans un contexte colonial à un bourgeois racisé) ; avec une histoire de « la race » comme catégorie émergente à partir du 15ème siècle dans un contexte de conquête catholique de l’Espagne, d’émergence de relations géopolitiques inégales et de colonisation occidentale du monde ; avec une critique des théories du racisme comme hostilité entre des groupes ethniques hétérogènes mis dans un même espace ; avec une présentation des catégories raciales comme mise en ordre inégalitaire (et excluante) des sociétés ; avec un rappel de l’articulation et de l’interpénétration dynamique (avec la frange surexploitée et/ou exclue du prolétariat très souvent racisée) des rapports de domination de race, de classe et de genre (plus ou moins déterminants en fonction des contextes), et du caractère historiquement changeant du racisme ; avec une mise en exergue des similitudes du discours du PIR et de l’anti-racisme républicain d’une part (focalisation sur un niveau politico-juridique comme responsable du racisme, compris comme ensemble de « politiques », et donc comme moyen de mettre fin au racisme, comme soi-disant au sujet de l’antisémitisme à partir de 1945) et des anti-racialisateurs et de l’anti-racisme républicain d’autre part (même discours avec deux concepts « universalistes » interchangeables, celui de prolétariat et celui d’humanité), et même des trois (vision du racisme comme produit d’un petit groupe de gens, qu’il s’agisse du patronat, de l’État colonial blanc et/ou de l’extrême-droite).

Écouter la seconde partie de l’émission :

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Après des extraits sonores de Colette Guillaumin, une présentation des écueils potentiels d’une théorie matérialiste du racisme : le réductionnisme idéaliste (ou sémiologique), qui absolutise « la race » comme un champ séparé du réel et comme principalement un fait de discours ; le réductionnisme économique, qui au contraire déduit « les races » des catégories du capital (« population surnuméraire » ou encore « classe surexploitée ») ; le fonctionnalisme, qui déduit les processus de racialisation par leur fonction/intérêt du point de vue du capital (surexploitation, division des ouvriers), oubliant complètement l’autonomie relative du racisme comme idéologie (partiellement) irrationnelle ; et enfin l’objectivisme intégral, faisant des groupes racisés des objets passifs du racisme, alors qu’il s’agit plutôt d’acteurs d’un rapport de pouvoir antagonique, éventuellement susceptibles de s’abolir en tant que « race » en abolissant le système raciste lui-même.


A lire également  :
Colette Guillaumin – L’idéologie raciste

Colette Guillaumin – L’idéologie raciste

Un livre majeur paru en 1972 de Colette Guillaumin, sociologue et militante féministe et antiraciste. Indispensable pour comprendre la genèse de cette idéologie et les conditions matérielles d’apparition du racisme contemporain.

Ce livre décortique méthodiquement le racisme systémique de nos sociétés. Cette étude sera la base d’une œuvre qui se doublera d’une l’analyse matérialiste du sexisme dans de nombreux articles et essais parus dans diverses revues et qui seront regroupés et publiés dans le recueil « Sexe, Race et Pratique du pouvoir » en 1992.

Cliquer sur la couverture pour accéder au fichier pdf du livre :

Il n’est point ici question d’une condamnation morale convenue, mais d’une œuvre de sociologie. L’essentiel, en effet, n’est pas l’objet de la croyance raciste – l’inégalité des êtres ou les particularités génétiques et morales -, mais la croyance elle-même, la volonté de distinguer son identité propre de celle d’autres groupes en fonction de signes distinctifs, individuels et collectifs. Le grand basculement s’opère au XVIIIe siècle : à une Nature ordonnée par Dieu selon une hiérarchie où chacun, depuis Aristote, trouve sa place dans une grande harmonie sociale, voire une division du travail, succède un univers désenchanté, mécaniste, où les principes de la biologie régissent désormais les êtres, donc leurs capacités supposées, leur subordination et leur exclusion possible. Dès lors, la race n’apparaît pas comme un signe de nature biologique repérable dans les faits, mais plutôt comme une forme biologique d’exclusion sociale, utilisée comme signe, à seule fin de distinguer, discriminer, mettre à part.
Les travaux des biologistes et généticiens sont salutaires, qui disent l’impossibilité de travailler avec une notion aussi indéfinissable que celle de race ; il n’empêche. La race, dans le langage ordinaire, est une modalité de distinction. Peu importe qu’elle ne corresponde à aucun outil classificatoire réel ; l’essentiel est que le terme permette l’acte : rejeter.
Une étude pionnière, qui a inspiré depuis toutes les grandes recherches sur le sujet.

Une présentation en vidéo du bouquin :


A lire également de Colette Guillaumin :
« Je sais bien mais quand même » ou les avatars de la notion « race »
Sexe, Race et Pratique du pouvoir – L’idée de Nature